Museau Obscur ouvrit les yeux quand un mince rayon de soleil se posa sur ses paupières. le soleil devait être levé, il était temps d'en faire de même. Comme toujours, la jeune guerrière était très impliquée dans son travail et voulait faire la meilleure impression possible auprès de son Clan -et de son père. Près d'elle, son frère dormait toujours, sa sœur et son mi, Épine de Sapin, était plus loin. la noiraude donna un coup de langue sur l'oreille de son frère endormi avant de sortir de la tanière. Les apprentis s'activaient déjà dehors, en plein travail pour les reines et les anciens. Elle en regarda un filer vers la tanière du guérisseur, une grenouille en gueule, avant de s'éclipser à son tour dans la forêt. Le Clan avait besoin de gibier frais !
Une fois dehors, elle se mis en quête de proies faciles, vu qu'elle n'était pas une bonne chasseuse. Elle flaira l'odeur fraiche d'une souris et aussi celle d'une pinson. Mmmmh... les rongeurs d'abord. La noiraude se tapit au sol, prête à bondir sur sa cible, lorsqu'elle sentit une odeur suspecte. Elle retroussa ses babines et se dirigea vers la clairière. Oui, un étranger avait pénétré sur son territoire. Quelle impudence ! Elle bondit à travers les fourrés et elle vit une autre femelle, toute noire. Halala, comment oublier cette sale peste qu'elle avait rencontré alors qu'elle n'était qu'une petite à la pouponnière ? Museau Obscure montra les gros et hérissa tout son poil. Lueur Obscure ! Quand elle prononça son ancien nom, la guerrière releva dédaigneusement le menton et feula :


« Je suis Museau Obscur à présent ! Guerrière du Clan du l'Ombre, et celle qui va signer ton arrêt de mort aujourd’hui, espèce de vaurienne. »

La noiraude se tapit au sol en poussant des grognements menaçants. Aucun félin n'avait le droit de pénétrer ainsi sur son territoire en toute impunité, cette erreur serait réparée ! Aussitôt Museau Obscur, bondit en avant, toutes griffes dehors.

Museau Obscur sentit ses griffes passer sur l'épaule de la solitaire. Satisfaite, elle fit demi-tour, la gueule ouverte sur des dents terribles qu'elle montrait à son adversaire. Mais Lueur Obscure avait déjà bondi sur elle et lui lacéra le dos de ses griffes. La jeune noiraude poussa un cri mêlant douleur et colère et mordit de toutes ses forces dans une patte de la solitaire, mais cette dernière ne lâcha pas. Finalement, les deux chattes se séparèrent pour se fixer froidement. Le dos de la chatte lui brûlait terriblement et la poussière sous elle se teintait de pourpre. Malgré tout, sa queue battait furieusement l'air et ses pattes piétinaient le sol 'un air impatient. A la phrase de Lueur Obscure elle poussa un feulement contrariée et se cabra :


« Cesse de papoter, trouillarde, ou je t'arrache la langue ! »

Sans attendre, elle recommença son attaque et visa le front cette fois. Les pattes en avant, elle fit mine de vouloir la faucher et se mit sur ses pattes au dernier moment pour la frapper au visage d toutes ses forces, griffes rentrées pour rendre le choc plus violent encore et l'étourdir. Puis elle donna un coup de tête au menton avant de se battre au corps à corps avec l'ennemie. Même si elle perdait de ses forces, elle ignorait la douleur que l'autre lui infligeait. Entre deux coups de crocs, elle se pencha en avant et souffla :


« Tu jacasses trop, vieille pie. Je ferais mieux de mettre ma menace en exécution. »

Malgré les coups insistants mais faiblissant de l’errante, Museau Obscur parvint à se dégager en gesticulant dans tous les sens. Quand la guerrière du clan de l’Ombre parvint à se relever assez vivement, Lueur Obscure faillit trébucher et s’étaler au sol, mais elle se rattrapa au dernier moment. Si elle shootait dans un caillou et perdait l’équilibre, son adversaire clanique n’attendrait pas une seconde pour lui bondir dessus et la blesser encore plus qu’elle ne l’est actuellement. En effet, l’odeur nauséabonde du sang félin s’était répandue dans toute la Clairière, elle commençait à donner légèrement le tournis à l’errante.
De nouveau stable sur ses quatre pattes, la noiraude se redressa, prête à faire face à l’attaque de sa cadette. Mais non. Les crocs découverts, la guerrière de jais était simplement là, sur la défensive tout de même, se tenant devant son ennemie de longue date. C’est là que Lueur Obscure put découvrir ce qu’elle avait fait à son adversaire, pour la première fois. Le dos musculeux de la femelle noire rougeoyait de son sang, des grosses gouttes de ce liquide visqueux ne coulaient. Sinon de petites plaies saignantes étaient ouvertes un peu partout sur son corps. Mais ne vous y méprenez pas, la chatte errante aussi était bien amochée. L’une de ses pattes avant de touchait même plus le sol tant elle la faisait souffrir. Une partie de son membre était tout poisseux du sang qui ne cessait pas de s’écouler de la profonde plaie de la chatte. Habituellement, elle aurait lancé depuis longtemps une autre provocation mais pas là, quelque chose avait changé. Sa fierté et son humeur bagarreuse avaient disparu. Ce n’était pas que son sang qui s’écoulait continuellement de sa plaie. Il y avait également son audace et son éternel « orgueil inné » qui s’était évaporée. C’était la première qu’elle avait eu à faire à un adversaire avec la même puissance qu’elle-même. Elle ouvrait enfin les yeux. Elle comprenait enfin ce que lui avait fait toute son arrogance.
Lueur Obscure recula d’un pas, les crocs cependant découverts. Si la circonstance le voulait, elle se battrait, encore et toujours. Mais simplement si l’autre faisait le premier pas. Elle comprenait que la situation n’était pas du tout à son avantage. Mais son immense fierté et incalculable amour-propre l’empêchaient de se rendre ou d’abandonner. Heureusement pour elle et sa force physique, cela ne tarda pas :
Le combat est inutile. » gronda-t-elle, la queue battant rageusement le sol. « Va-t-en d'ici maintenant, regagne ta ville puante et nous aurons toutes deux la vie sauve.

Lueur Obscure feula à son tour. Mais ça, c’est juste la part d’arrogance personnelle qui rôdait toujours en elle qui continuait de s’exprimer. Avançant de coté, sur 3 pattes, elle ne lâchait pas Museau Obscur des yeux. Et puis c’était surtout qu’elle n’aimait pas qu’on la traite comme une chatte errante des villes comme une ordure que l’on trouve dans ces poubelles de bipèdes. Elle avait un amour propre tellement démesuré qu’elle ne pouvait pas l’ignorer.
-Oui. *elle marqua une pause où elle feula doucement * Va donc pleurnicher chez Papa. Peut-être qu’un jour tu auras assez de cervelle pour te rendre compte que ta vie là-bas n’est qu’une perte de temps. Rares sont ceux qui en ont assez pour s’en échapper. Peut-être feras-tu partie de l’élite …

Puis tourna les talons et partit, avec le plus d’assurance et de fierté possible. Ça, elle ne l’avait pas abandonnée sa fierté ! Tout en marchant, elle gardait les oreilles à l’écoute. Peut-être que Museau Obscur était assez lâche pour attaquer un félin de dos … ? Mais rien. Ce n’est que quand, Lueur Obscure arriva à la limite de la Clairière parsemée de touffes de fourrure noire qu’elle miaula, d’une voix glaciale. Cependant, elle n’avait pas que du froid. Elle était comme si elle s’adressait à un vieil ennemi, que l’on connaît depuis longtemps et que l’on quitte presque à regret –ce qui était paradoxalement son cas.
-À la revoyure … Petite inconsciente …